samedi 23 novembre 2013

Daniel Darc - Chapelle Sixteen



Le 28 février 2013 au soir, en rentrant du merveilleux concert de Sigur Ros à Lille, je dis à ma mère que j'aimerais beaucoup aller voir Daniel Darc en concert, ma révélation française du moment... Le lendemain, au réveil, j'allume mon ordi, me connecte et vois en page d'accueil cette terrible nouvelle : "L'ex-leader de Taxi Girl n'est plus..."
Je suis effondré... Certes, il a passé la moitié de sa vie à se détruire, mais tout de même, 52 ans, c'est beaucoup trop jeune...

Les deux semaines qui suivirent sa mort, je les passais à réécouter en boucle La Taille de mon Âme, son ultime opus sorti en 2011, disque extrêmement touchant, où on sentait que le chanteur destroy ne l'était plus vraiment et qu'il commençait enfin à être heureux... Puis, quelques mois passent et l'on apprend que Daniel Darc était sur le point de terminer un nouveau disque, avec son acolyte Laurent Marimbert... L'ordre des morceaux avait été décidé, ainsi que son titre et tout était presque terminé...
Laurent Marimbert décide de sortir ce disque, sur la demande que lui avait fait Daniel Darc de le sortir s'il lui arrivait quelque chose, après avoir finalisé les derniers détails.

C'est ainsi que sort Chapelle Sixteen à l'automne 2013. D'entrée de jeu, je suis enchanté avec ce très beau digipack. Surprise également, un deuxième cd contenant les morceaux inachevés.
Certaines détails prouvent que cet album est en quelque sorte la suite du précédent : la police d'écriture est identique, la pochette en noir et blanc, les variations que l'on retrouve entre les morceaux (interludes courts, des chutes de studio très drôles, soit des textes parlés...)...

Cet album n'en reste pas moins assez étonnant : que ce soit la musique classique (avec orchestre symphonique) de Les 3 Singes, le blues de Chapelle Sixteen, le jazz-rock de Un Peu de Sang (que l'on croirait tout droit sorti des sessions de Bitches Brew de Miles Davis) ou encore l'ambient de Période Bleue, cet album se démarque par son grand éclectisme tout en restant parfaitement homogène. Quant aux textes, ils sont toujours aussi beaux et pleins de poésie où l'on sent bien la patte du maître...

Certains titres auraient en revanche pu se retrouver sur La Taille de Mon Âme, tels que Que Sont Devenus les Hommes avec une intro au Wurlitzer, assez présent sur l'album précédent. Une magnifique ballade au piano (alors que je ne suis pas très friand de ceci à la base) avec Des Idiots comme Moi, ou encore la ligne de contrebasse entêtante de La Dernière Fois, un morceau assez jazzy au final. Sur les trois derniers morceaux (hors Variations), nous retrouverons l'orchestre symphonique (de Budapest). Et ces trois morceaux sont pourtant très différents les uns des autres : en premier lieu, Mauvaise Journée, sublime complainte de la peur du lendemain, puis Ita Bella, dédié à sa grand-mère morte à Auschwitz (encore une fois le piano est très présent ainsi que des instruments à vent en plus de l'orchestre symphonique), très touchant.

Et puis vient l'ultime chef-d'oeuvre de Daniel Darc pour terminer le disque : Les Enfants.
Long morceau de douze minutes où toutes les notes, tous les mots sont poignants... Que ce soit l'arpège de piano, le sublime bend gilmourien qui revient assez souvent dans le morceau, les cloches, ou encore cette ligne de 5 notes jouée inlassablement par l'orchestre, où chaque coup d'archet me fend le coeur... Et les paroles... Jamais Daniel Darc ne m'aura autant touché ! Et les derniers vers, où l'on a l'impression qu'il savait ce qui allait lui arriver...: "Si je meurs, j'irai en enfer, et si je tombe je meurs... à m'arrêter... Je vais en enfer, mais l'enfer c'est long, surtout vers la fin, c'est comme l'éternité..."
Et c'est ainsi que le tout dernier morceau de Daniel Darc se termine, par ces vers poignants, par cette mélodie splendide, par son plus beau morceau.

Et voilà, nous n'entendrons plus jamais de disque de ce poète. Et l'on ne peut pas dire que c'est un album posthume pour faire du fric, car il s'agit pour ma part de son meilleur album. Certaines phrases sont tellement touchantes, et Marimbert a réalisé un travail de titan pour tout arranger, tout composer et même jouer sur tous les morceaux. On oublie souvent de le citer mais sans lui, rien n'aurait été possible, et cette galette n'aurait jamais vu le jour. Et de voir partir son récent acolyte l'a profondément touché, surtout quand on lit le dos du livret qui m'a personnellement fais couler une larmichette... Reste la poésie inimitable du regretté Darc, plus présente et plus belle que jamais... Daniel, "tu es un géant."




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